Avis relatif au premier projet de loi de finances rectificative pour 2022

Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, en application de l’article 15 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, de l’article liminaire du premier projet de loi de finances rectificative (PLFR1) pour 2022 pour rendre un avis sur les prévisions macroéconomiques associées ainsi que sur la cohérence de ce projet de loi avec la trajectoire pluriannuelle de solde structurel définie par la loi de programmation des finances publiques de janvier 2018 (LPFP). Le Haut Conseil a adopté, après en avoir délibéré lors de sa séance du 1er juillet 2022, le présent avis.

Synthèse de l'avis

Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement de l’article liminaire du premier projet de loi de finances rectificative (PLFR) pour 2022 le 29 juin 2022, en vue de rendre un avis deux jours plus tard. Un tel délai, nullement justifié par l’urgence, est très réduit au regard de la complexité du contexte macroéconomique et de l’ampleur des mesures contenues dans ce PLFR. Il rend particulièrement difficile l’exercice par le HCFP du mandat qui lui est confié par la loi organique.

Le Haut Conseil estime que la prévision de croissance pour 2022 du Gouvernement n’est pas hors d’atteinte mais est un peu élevée. L’inflation prévue pour 2022 paraît à l’inverse un peu sous-estimée. La prévision de croissance de la masse salariale pour 2022 est quant à elle plausible.

Le déficit public prévu par le Gouvernement s’établit à 5,0 points de PIB en 2022, stable par rapport à la loi de finances initiale (LFI), mais avec des recettes et des dépenses plus élevées de presque 60 Md€.

Cette prévision paraît affectée de risques essentiellement défavorables.

S’agissant des dépenses, les charges d’intérêts de la dette pourraient être accrues, notamment celles des titres de dette indexés sur l’inflation en raison d’une inflation plus élevée que prévu. Les dépenses de santé risquent aussi d’être plus élevées en raison de la récurrence des vagues épidémiques. Le coût de certains dispositifs tels que les boucliers tarifaires sur le gaz et sur l’électricité, sensible à l’évolution des prix de marché de l’énergie, est quant à lui entouré d’une grande incertitude, tant ces prix sont volatils.

S’agissant des recettes, la prévision repose sur une hypothèse de croissance spontanée des prélèvements obligatoires nettement supérieure à celle du PIB. Si celle-ci peut en partie se justifier par le dynamisme de la masse salariale et des prix à la consommation, le produit de certains prélèvements obligatoires (droits de mutation, impôt sur les sociétés, taxe intérieure de consommation sur les produits énergétiques) risque toutefois de pâtir davantage que prévu de la dégradation amorcée du marché immobilier, de celle des résultats des entreprises, ou encore d’une baisse accrue de la consommation de carburant.

Aux termes de la loi organique du 17 décembre 2012, le Haut Conseil doit se prononcer sur la cohérence de la trajectoire de solde structurel retenue dans le PLFR1 pour 2022 avec celle de la loi de programmation des finances publiques du 22 janvier 2018 pour les années 2018 à 2022.

Le solde structurel présenté dans le PLFR1 pour 2022 (-3,6 points de PIB potentiel) s’améliorerait de 0,8 point par rapport à 2021 grâce, exclusivement, à une croissance spontanée des prélèvements obligatoires très supérieure à celle du PIB. Il demeurerait toutefois dégradé de 2,8 points par rapport à celui inscrit dans la loi de programmation de janvier 2018, dont le Haut Conseil rappelle qu’elle constitue une référence dépassée.

La forte augmentation de la charge de la dette pour 2022 (+17,8 Md€) par rapport à la LFI rappelle que la plus grande vigilance doit être apportée à la soutenabilité à moyen terme des finances publiques. Si les conséquences économiques de la guerre en Ukraine et de la pandémie de Covid-19 peuvent justifier des mesures de soutien ponctuelles, des mesures de maîtrise de la dépense couplées à la recherche d’une plus grande efficacité de celle-ci devront rapidement être mises en œuvre pour réduire durablement le poids de la dette publique.