Avis relatif aux projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour l'année 2021

 Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement le 17 septembre 2020, en application de l’article 14 de la loi organique n° 2012-1403 du 17 décembre 2012 relative à la programmation et à la gouvernance des finances publiques, des prévisions macroéconomiques et d’éléments d’information relatifs aux finances publiques sur lesquels reposent les projets de loi de finances et de financement de la sécurité sociale pour 2021. Le Haut Conseil a adopté, après en avoir délibéré lors de sa séance du 21 septembre 2020, le présent avis.

Synthèse de l'avis

En raison de la crise sanitaire entraînée par l’épidémie de Covid-19, les incertitudes demeurent exceptionnellement élevées. Elles fragilisent les exercices de prévisions macroéconomiques et de finances publiques et rendent délicate l’appréciation par le Haut Conseil des finances publiques du scénario du projet de loi de finances pour 2021.

Dans ce contexte, le Haut Conseil considère que le niveau d’activité qui serait atteint en 2021 dans le scénario du Gouvernement (-2,7 % par rapport à 2019), très dépendant de l’évolution de la situation sanitaire, est plausible. Il estime que la prévision d’activité pour 2020 est prudente et, à l’inverse, que l’ampleur du rebond prévu pour 2021 est volontariste.

Le Haut Conseil estime que la prévision d’inflation du Gouvernement est plausible, mais un peu basse. Celles d’emploi et de masse salariale pour 2020 et 2021 sont elles aussi plausibles.

Pour 2020 et 2021, le Haut Conseil considère que les prévisions des prélèvements obligatoires sont cohérentes avec le scénario macroéconomique retenu et que les prévisions de dépenses publiques sont vraisemblables. Le solde public nominal prévu pour 2020 et 2021 (respectivement - 10,2 et - 6,7 points de PIB) est atteignable mais cette prévision est affectée par les très fortes incertitudes qui entourent les conditions sanitaires et les évolutions macroéconomiques.

Aux termes de la loi organique du 17 décembre 2012, le Haut Conseil doit se prononcer sur la cohérence de la trajectoire de solde structurel retenue dans le PLF pour 2021 avec celle de la loi de programmation en vigueur, celle du 22 janvier 2018 pour les années 2018 à 2022.

Le Haut Conseil constate ainsi que le solde structurel présenté par le Gouvernement se dégraderait de 1,2 point entre 2019 et 2021 et s’établirait à - 3,6 points de PIB en 2021. Le solde structurel prévu en 2021 serait ainsi inférieur de 2,4 points à celui inscrit dans cette loi de programmation, soit un écart important au sens de la loi organique de décembre 2012.

Toutefois, le Haut Conseil relève que la loi de programmation de janvier 2018 constitue désormais une référence dépassée, qu’il s’agisse du scénario macroéconomique ou de celui de finances publiques. En particulier, la crise sanitaire a affecté le potentiel productif de l’économie française. Le Gouvernement présente d’ailleurs à titre informatif dans le PLF une estimation du PIB potentiel révisée fortement en baisse par rapport à la loi de programmation. La prise en compte de cette nouvelle estimation conduirait à dégrader de plus d’un point le solde structurel en 2021.

En conséquence, le Haut Conseil estime nécessaire l’adoption dès le printemps 2021 d’une nouvelle loi de programmation des finances publiques fixant une nouvelle trajectoire d’évolution du PIB et du PIB potentiel ainsi que de finances publiques.

Enfin, le Haut Conseil constate que le ratio de dette publique s’établirait, en 2021, 18 points de PIB au-dessus de son niveau d’avant-crise et 22 points au-dessus de celui prévu par la loi de programmation. Cette augmentation massive, résultant d’un choc aussi violent qu’inédit sur l’activité et de la réponse budgétaire apportée, intervient après une décennie quasi ininterrompue de hausse de la dette.

Dans un contexte de croissance potentielle affaiblie rendant plus difficile la réduction du déficit, la soutenabilité à moyen terme de la dette publique constitue un enjeu central de la stratégie financière de la France et appelle la plus grande vigilance.