Le Haut Conseil des finances publiques a été saisi par le Gouvernement, le 24 octobre 2025, pour rendre un avis sur le réalisme des prévisions macroéconomiques, de recettes et de dépenses associées au projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) pour 2025, et sur la cohérence de ce projet de loi au regard des orientations pluriannuelles de solde structurel et de dépenses définies dans la loi de programmation des finances publiques (LPFP).
Le projet de loi de finances de fin de gestion (PLFG) pour 2025 repose sur le même scénario économique et affiche la même prévision de solde public (en points de PIB) que le projet de loi de finances (PLF) pour 2026 sur lequel le Haut Conseil s’est prononcé le 9 octobre dernier. À cette occasion, le Haut Conseil avait estimé que, pour l’année 2025, le scénario économique actualisé était réaliste, et que les prévisions de recettes, de dépenses et donc de solde étaient crédibles.
Le Haut Conseil estime que dans l’ensemble, le scénario économique reste réaliste. En particulier, la prévision de croissance du PIB pour 2025 (+0,7 %) est réaliste et a même des chances d’être dépassée. En effet, selon la première estimation des comptes nationaux, publiée par l’Insee après la saisine du Haut Conseil, la croissance au troisième trimestre a été plus favorable qu’attendu, portant l’acquis de croissance pour l’année à 0,8 %.
La prévision d’inflation (+1,1 % pour l’indice des prix à la consommation en moyenne annuelle) reste globalement plausible, même si le chiffre final pourrait être légèrement plus faible, compte tenu notamment de l’évolution récente en baisse des prix du pétrole et de l’estimation flash d’octobre, publiée après la saisine. L’hypothèse de croissance de la masse salariale des branches marchandes non agricoles (+1,8 %) est atteignable mais paraît toujours un peu haute au regard des dernières informations, notamment en provenance de l’Urssaf.
Le Haut Conseil considère que la prévision de prélèvements obligatoires du PLFG, révisée en légère baisse par rapport à celle du PLF pour 2026 (−0,6 Md€), est crédible. Elle est exposée à des aléas d’ampleur usuelle à ce stade de l’année. Selon cette prévision, les prélèvements obligatoires augmenteraient de 4,0 % en 2025, dont 2,1 % au titre de l’évolution spontanée, elle-même légèrement inférieure à celle du PIB nominal (2,3 %), et le reste au titre des mesures nouvelles de prélèvements, qui totalisent près de 25 Md€.
Le Haut Conseil estime que la prévision de dépenses publiques, légèrement ajustée à la hausse par rapport au PLF pour 2026 (+1,0 Md€) est vraisemblable, avec des aléas à la hausse notamment sur la sphère sociale et à la baisse sur la sphère locale. Selon cette prévision, la dépense publique augmenterait de 2,7 % en valeur en 2025, soit environ 1,2 % en volume. L’évolution des dépenses en 2025 est plus soutenue dans le secteur des administrations sociales que dans les autres sous-secteurs.
Au total, le Haut Conseil estime que la prévision de solde public du PLFG pour 2025, qui s’établit toujours à −5,4 points de PIB, reste crédible moyennant les incertitudes rappelées ci-dessus sur les recettes et les dépenses. Cela ne signifie pas qu’une exécution avec un déficit public de 5,4 points de PIB soit certaine, mais que cette prévision apparaît centrale au regard des informations disponibles à ce jour et que les aléas autour de celle-ci sont globalement équilibrés. Une stricte maîtrise en fin de gestion des objectifs de dépenses pilotables accroît les chances de tenir l’objectif de solde.
L’ajustement structurel, c’est-à-dire la réduction du déficit structurel, devrait être notable en 2025, à +0,6 point de PIB. Cet ajustement en 2025 ne suffirait cependant pas à revenir à la trajectoire de la loi de programmation des finances publiques, à laquelle le Haut Conseil reste tenu de se référer. Dans les faits, les engagements pris dans le plan budgétaire et structurel à moyen terme au titre des règles européennes révisées en 2024 se substituent à ceux de la loi de programmation. La dépense primaire nette, l’agrégat suivi dans le cadre de ces engagements, évoluerait de façon compatible avec le seuil de tolérance agréé mais dépasserait de 0,2 point l’évolution recommandée pour 2025.
L’effort structurel, qui constitue l’estimation la plus usuelle de la contribution des mesures budgétaires à l’évolution du déficit public, serait aussi notable en 2025, à +0,8 point de PIB. Cet effort structurel en 2025 proviendrait intégralement des mesures nouvelles de hausses de prélèvements obligatoires, tandis que l’effort en dépense serait nul : les mesures mises en œuvre en dépense conduisent en effet à contenir la dépense en volume dans une augmentation à peu près en ligne avec la croissance potentielle.
Le Haut Conseil souligne que la réduction du déficit public en 2025 est au final limitée (0,4 point de PIB), d’autant qu’elle fait suite à une forte dégradation des comptes en 2023 et 2024. Le déficit public en 2025 resterait ainsi supérieur de 0,7 point de PIB au niveau de 2022 et nettement supérieur au déficit qui stabiliserait le ratio de dette publique.
Du fait du maintien de niveaux de déficit très élevés, la dette publique continue de croître à un rythme préoccupant. Le rapport de la dette au PIB continuerait ainsi à augmenter de près de 3 points supplémentaires en 2025 et dépasserait cette année, à 116 points de PIB, le point haut atteint en 2020 lors de la crise sanitaire. La dynamique de hausse de la dette singularise la France relativement à ses principaux partenaires de la zone euro.
De plus, les conditions d’emprunt public de la France se sont dégradées, en termes absolus comme au regard de ses partenaires, notamment du sud de l’Europe. Au total, du fait de la hausse des taux longs et du niveau d’endettement, la charge d’intérêts continue de progresser fortement. Elle atteindrait selon le PLFG 2,2 points de PIB en 2025, en hausse de 0,9 point de PIB en cinq ans, depuis son point bas de 2020.
La réduction du déficit attendue en 2025 ne peut ainsi être qu’une toute première étape de la trajectoire de redressement nécessaire des comptes publics. Au-delà de la tenue des objectifs en 2025, le Haut Conseil souligne qu’il est indispensable de poursuivre dans la durée cet effort de redressement pour stabiliser le ratio d’endettement et respecter les engagements pris par la France, en particulier le retour du déficit sous 3 % du PIB d’ici à 2029.